Le Parlement, dans un dernier vote du Sénat le 16 juillet, a définitivement adopté le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, avec un texte issu de la commission mixte paritaire. Il est à noter que Sénat et Assemblée ont réussi à se mettre d’accord sur un texte commun, ce qui est de plus en plus rare, le gouvernement et sa majorité ayant trop tendance à tenir pour quantité négligeable les travaux de la Haute Assemblée.
Après avoir voté contre le projet de loi en séance, le groupe socialiste et divers gauche s’est abstenu sur le texte final, lors de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire. Pourquoi ?
Nous ne sommes pas en présence d’une loi de transformation du système de santé mais d’une loi de cadrage, bien floue du reste.
Si de grandes orientations de ce texte (réforme des études médicales, exercice collectif, gradation des soins, numérisation au service de la santé) peuvent être partagées, à la condition de ne pas viser à privatiser progressivement le secteur de la santé, le recours en grand nombre aux ordonnances sur des sujets majeurs et structurants, tels que la carte hospitalière, n’est pas acceptable. Le gouvernement demande de fait au Parlement de lui confier un blanc-seing concernant les régimes d’autorisations des activités de soins, ce qui suscite de vives inquiétudes quant à l’aggravation des inégalités territoriales.
L’examen de cette loi de cadrage, ne nous a pas permis, de par sa conception même, d’appréhender ses implications réelles dans nos territoires, pour les personnels de santé et surtout bien sûr pour les usagers, les malades, en matière d’accès aux soins. Il est ainsi très difficile de concevoir l’architecture future du système de santé qui va se trouver largement complexifiée.
Nous ne sommes ainsi pas favorables au processus de centralisation opéré autour des groupements hospitaliers territoriaux (GHT), en rendant obligatoire la commission médicale de groupement et un renforcement de la gestion financière et du personnel par le GHT. Cette centralisation forcée nous fait craindre pour les moyens des établissements « périphériques ».
Insuffisant en matière d’accès aux soins, le projet de loi laisse des pans entiers de côté, tels que la situation des services des urgences pourtant largement en grève, la psychiatrie ou la question de l’autorisation des implants qui a fait l’objet d’un scandale récemment ou bien encore de la pénurie de médicaments alors que les ruptures d’approvisionnement se développent.
Néanmoins, sur le sujet essentiel pour nos territoires, de la lutte contre les déserts médicaux et l’accès aux soins pour tous, le Sénat a fait œuvre utile, à l’initiative notamment de notre groupe. L’adoption d’amendements communs à plusieurs groupes, dont un amendement socialiste, portant sur le 3ème cycle des études de médecine générale (et d’autres spécialités) a apporté une solution pertinente, réaliste et efficace à l’angoisse de nos concitoyens et de leurs élus vivant dans les zones où la présence médicale se raréfie. Voilà comment nous pouvons dépasser les clivages politiques pour porter ensemble l’intérêt général.
Ainsi, sans affaiblir leur formation, en liant professionnalisation et lutte contre les déserts médicaux avec un stage en médecine ambulatoire obligatoire de six mois en fin d’étude, ce sont plusieurs milliers de futurs médecins qui viendront irriguer nos territoires et participeront à répondre à l’enjeu de l’accès aux soins de tous nos concitoyens.
Le gouvernement était très opposé à ce dispositif innovant et pourtant quasi-consensuel au Sénat. C’est la pression commune des principaux groupes du Sénat, dont le nôtre, sur le gouvernement et sa majorité qui comptaient sur une adoption rapide de ce projet de loi, qui a permis d’aboutir à un compromis actant le maintien dans le texte de cette disposition de lutte rapide contre les déserts médicaux. Car l’urgence est bien de répondre aux demandes de nos concitoyens désemparés. Notre volontarisme sur cette question de la désertification médicale a payé et c’est cet aspect fondamental qui a justifié l’évolution de notre vote vers une abstention constructive. Car notre dispositif est de nature à résoudre cette question plus rapidement, en complément des dispositifs existants.