La désinformation concernant le contenu de ce projet de loi doit être combattue. Cinq mesures souvent évoquées n’y figurent absolument pas :
Il n’y a pas de suppression du principe de majoration des heures supplémentaires. Demain comme aujourd’hui, les heures supplémentaires doivent être payées avec une majoration. C’est essentiel pour préserver le pouvoir d’achat des salariés. Ce qui change avec le projet de loi : les entreprises pourront éventuellement prévoir, par accord, un taux de majoration éventuellement inférieur à celui fixé par la branche. Mais il ne devra jamais être inférieur à 10%. Cela permettra aux entreprises d’adapter le taux de majoration en fonction de la situation économique ou de la taille de l’entreprise, qui peuvent être différentes au sein d’une même branche, et en fonction d’autres contreparties prévues par accord (intéressement par exemple). Ceux qui veulent remettre en cause les heures supplémentaires, c’est ceux qui proposent de supprimer les 35h.
Il n’y a ni suppression ni remise en cause de la durée du temps de travail à 35h. Dès les lois ayant mis en place les 35 heures, des souplesses et des aménagements ont été mis en place pour permettre aux entreprises d’adapter le cadre de cette durée légale à leurs spécificités. Le projet de loi s’inscrit dans cette logiqueIl ne faut pas faire de confusion : ce projet de loi préserve les 35h.
Il n’y a ni suppression ni remise en cause du CDI. Le projet de loi ne porte pas d’atteinte au CDI, qui doit rester la forme normale de contrat de travail. Elle ne favorise pas non plus les licenciements, qui devront, comme avant, être justifiés par des difficultés économiques, dont la réalité et la gravité doivent être démontrées par l’entreprise. Le projet de loi sécurise la définition du licenciement économique, plus protecteur pour les salariés, pour mieux garantir leurs droits, avec des règles adaptées à la taille de l’entreprise. En procédant à cette clarification, l’objectif n’est pas de remettre en cause le CDI, mais au contraire de le conforter et de lutter contre la segmentation du marché du travail. Aujourd’hui, compte tenu des incertitudes des employeurs si la situation ne se passe pas comme prévu, ils privilégient massivement le CDD : ceux-ci représentent 80 % des embauches, dont la moitié qui durent moins d’une semaine. Cela n’existait pas il y a 15 ans. Il faut combattre cette précarité nouvelle.
Il n’y a pas de suppression des congés en cas d’événements familiaux (décès, mariage, naissance, …).Au contraire : un plancher est fixé à l’accord pour la durée des congés pour événements familiaux. Au-delà : un minimum de 5 jours est fixé pour le décès d’un enfant, au lieu de 2 actuellement.
Il n’y a pas de restauration de l’apprentissage dès 14 ans. La loi Cherpion, permettant l’apprentissage dès 14 ans, a été abrogée en 2013 : il n’est plus possible d’entrer en apprentissage avant 16 ans (ou en pré-apprentissage avant 15 ans). En cohérence, ce gouvernement n’a aucune intention de réinstaurer ce qui constituait un dispositif d’exclusion précoce du collège. Une proposition de loi de l’opposition a encore été rejetée à l’Assemblée nationale en février dernier. Si des mesures doivent être prochainement adoptées en matière d’apprentissage, elles concernent l’amélioration de la rémunération des apprentis, notamment par l’augmentation des minima légaux des plus jeunes, de 16 à 20 ans, que l’Etat prendra à sa charge au 1er janvier 2017 : telle est la mesure programmée pour lutter contre les effets de seuils liés à des critères d’âge, issue de la concertation avec les organisations de jeunesse.
Et aussi : quelques autres avancées de la loi
Renforcement contre la fraude au travail détaché, pour constituer l’arsenal le plus abouti d’Europe
Renforcement des branches professionnelles, en mettant fin à leur éclatement (passage de 700 à 200 branches en 3 ans) et en leur confiant la réalisation d’un bilan annuel des accords d’entreprise pour vérifier leurs conséquences sur les conditions de travail et la concurrence entre les entreprises
Rénovation du code de travail en 2 ans pour renforcer la négociation collective, avec les parlementaires et les partenaires sociaux,
Possibilité de conclure des accords types de branche qui pourront être directement déclinés dans les petites entreprises.
Possibilité de moduler le temps de travail élargie dans les PME pour faciliter l’adaptation à l’activité.
Création d’un service public d’accès au droit pour les PME
Maintien du périmètre d’appréciation du licenciement économique à l’identique de la situation actuelle
Amélioration de la médecine du travail : la visite d’information/prévention faite par un membre de l’équipe pluridisciplinaire fera l’objet d’une attestation, …
Elle n’y sont plus pour certaines. C’est le lancement raté de la loi qui a amené à ces mythes.
HEURES SUPPLÉMENTAIRES. Toute heure travaillée au-delà des 35 heures hebdomadaires continuera à être mieux payée. La majoration reste de 25% pour les huit premières heures supplémentaires, et de 50% pour les suivantes, mais une entreprise pourra négocier avec les syndicats un accord interne qui lui permet de limiter ce bonus à 10%.
Ce que cela change. Les entreprises vont avoir une plus grande marge de manœuvre. Aujourd’hui, une entreprise doit prendre en compte les accords de branche avant de négocier le bonus versé pour les heures supplémentaires : si l’accord de branche prévoit une majoration de 30%, l’entreprise ne peut donc pas descendre en dessous de ce taux. Avec la loi El Khomri, l’accord d’entreprise primera sur l’accord de branche : une entreprise pourra négocier une majoration de 10%, le minimum légal, même si l’accord de branche prévoit un bonus bien plus élevé. Une possibilité qui risque de devenir la norme puisque le rapport de force est moins favorable aux salariés au niveau de l’entreprise qu’au niveau de la branche, où les syndicats sont plus forts.
• LICENCIEMENT ÉCONOMIQUE. Des critères plus précis définissent le motif économique d’un licenciement : les difficultés économiques sont caractérisées par quatre trimestres consécutifs de baisse du chiffre d’affaires ou deux trimestres consécutifs de perte d’exploitation.
Ce que cela change. Aujourd’hui, une entreprise ne peut procéder à un licenciement économique que pour deux motifs : une cessation d’activité ou une mutation technologique. Elle peut également invoquer une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de l’entreprise, mais il faut alors prouver qu’elle est en péril. Demain, il suffira de remplir les conditions fixées par la loi El Khomri : les licenciements économiques seront donc plus faciles et moins contestables.
• RÉFÉRENDUM D’ENTREPRISE. En cas de blocage pour adopter un accord d’entreprise, les syndicats représentant au moins 30% des salariés pourront demander l’organisation d’un référendum. Le vote des salariés, à la majorité des suffrages exprimés, primera sur la décision des syndicats. Pour l’instant, ces référendums ne pourraient porter que sur certains dossiers (durée du travail, des repos et des congés).
Ce que cela change. Actuellement, pour qu’un accord soit valide, il doit recueillir soit la signature de syndicats ayant obtenu au moins 50% des voix aux élections professionnelles, soit la signature de syndicats représentant 30% des salariés mais à condition que les syndicats majoritaires ne s’y opposent pas. Un syndicat ayant obtenu plus de 50% des voix peut donc bloquer un texte, même si la majorité des salariés y est favorable. Avec ce référendum, une entreprise pourra donc contourner le ou les syndicats majoritaire(s), à condition de s’appuyer sur un syndicat pesant au moins 30% des suffrages. C’est d’ailleurs la stratégie qu’avait choisie la direction de l’usine Smart d’Hambach, en Moselle, pour revenir sur les 35 heures malgré l’opposition de la CGT et de la CFDT. Le vote qui y avait été organisé, qui n’a aujourd’hui aucune valeur, s’imposerait alors à tous.
Grande amélioration aussi : la création du Compte personnel d’Activité
Et pour les chèques vacances ?
et un raton laveur…
Vous assurez donc le SAV de Hollande et Valls. Fort bien.
Mais ayez l’honnêteté de reconnaître une chose : avec l’inversion de la hiérarchie des normes, ‘est tout l’ordre public social qui va s’en trouver bouleversé. En faisant de l’entreprise le lieu de production de la norme en matière de droits, vous incitez au dumping social. Qui peut croire que ce grand renversement du principe de faveur ne sera sans aucune conséquence sur les conditions de travail des salariés ?
Ne m’en veuillez pas de soutenir le gouvernement de M. Valls et le Président Hollande, j’ai oeuvré pour que nous prenions les responsabilités nationales.
Aucune autre formation de gauche-démocratique- n’est en capacité de le faire. Et la Droite: non merci
Merci Monsieur Roger d’avoir donné toutes ces précisions. ET bien sûr qu’aucun autre gouvernement et surtout pas celui qui a précédé celui de François Hollande n’aurait pu ni su entreprendre une aussi grande réforme, bien trop occupés à gérer leurs patrimoines et affaires personnelles et sans aucun respect pour la France.
L’enjeu est clairement exprimé ….et c’est là l’essentiel……
Quand à la CGT, son parcours est totalement incompréhensible et incohérent, sauf à avancer et installer des programmes résultant de nouvelles majorités, sans commune mesure avec ce qui est proposé….
Prétendre que « Hollande use des mêmes méthodes que Sarkozy » comme le fait Martinez, est fait pour cacher les réalités: user des mêmes méthodes ne signifie pas avoir le même programme! Mais trompez, mentez, il en restera toujours quelque chose …….
Ouais … Simple contribuable salarié de la fonction publique et père d’enfants en quête d’emploi, je ne suis pas sûr de bien comprendre tout ce qu’il y a dans les 388 pages du document que j’ai téléchargé sur Légifrance. Il faut dire que ce n’est pas à l’école qu’on apprend le droit du travail, et encore moins dans les entreprises. C’est vrai en particulier dans mon ministère d’état où les règles d’emploi, comme les autres ministères – sans parler des deux autres fonctions publiques que je connais mal ! – sont multiples et variées (vacataire, contractuel, titulaire, sans statut mais réglementé …) et où à travail égal, quels que soient le sexe, la couleur, la religion ou la qualification, on est (très !) loin d’un salaire égal … et d’un âge de la retraite et d’une pension égaux, pour une activité professionnelle similaire ou identique ! Alors avant de se lancer tête baissée, et surtout tête bornée, dans une réforme du code du travail, il eût mieux valu à mon humble avis de contribuable salarié de la fonction publique soumis à l’obligation de réserve, que ce gouvernement s’attaque profondément avec un sérieux esprit de justice et d’équité à la réforme des what-milles statuts des 3 versants de la fonction publique où règne un embrouillamini indescriptible de professions (certaines sont « matriculaires » !), et donc un infâme bordel catégoriel générateur d’innombrables chapelles et de différences de traitements subséquentes, toutes acceptions confondues du terme … Surtout que l’Etat est le plus voyou des patrons !
La boite veut réduire la fonction publique à police,justice,finances, c’est ce que vous espérez?
Mery explique bien comment la loi sera appliqué et le cas de l’usine SMART en est l’exemple le plus criant !
Serge, mon ami, ne soit pas excessif,il y a toujours un exemple en noir ou en blanc…Nous cherchons le juste milieu
Le code pour les accords temps de travail licenciement et autres doit rester là norme. Vu l’état d’esprit de certains patrons on ne peut pas envisager qu’un référendum puisse avoir des conséquences à la baisse pour les salariés car cela sera toujours le cas ou alors allons jusqu’au bout quand les salariés pensent que l’entreprise va mieux ils doivent avoir le droit eux aussi de faire un référendum.
Corto et Daniel ont fort bien exprimé les craintes de 70% de nos concitoyens, mais un autre aspect n’est que peu exprimé, c’est qu’avec l’inversion des normes la régulation économique qu’assuraient les CCN et autres accords de branches, disparait et donc cela va accélérer la guerre économique rendue visible par des fermetures d’entreprises et le développement du chantage à l’emploi afin de justifier des accords de régressions sociales.
Un tout petit peu de mémoire Mr Gilbert Roger, il y a quelque temps une usine Bosch dans l’est de la France a effectuer un chantage aux salariés de son entreprise. Il acceptaient de travailler plus de 35h sans aucune augmentation de salaire, ni règlement de leurs heures supplémentaires et leurs emplois étaient sauvés. Les syndicats représentatifs ont donc signés cet accord d’entreprise, résultat les salariés ont travaillé pendant deux ans dans ces conditions (39h payées 35h) en espérant que la boite ne ferme pas. Résultat après avoir signé l’accord le dirigeant de l’entreprise fermait boutique et licenciait tous les salariés. Il est vrai que dans ce cas les accord d’entreprise sont le pied.
S’il est vrai ne la majorité des patrons ne sont pas des voyous, il faut aussi bien penser que rien ne les empêchera avec près de 10% de chômeurs de faire du chantage à l’emploi et à la fermeture des usines.
Si les gens pouvaient simplement lire le détail de la loi… On comprend bien que tout le monde n’aie pas la culture législative pour saisir la totalité des articles de legifrance, ni la patience, mais il existe des comptes rendus dans des journaux bien connus, en ligne, simplifiés.
Quand au chantage, il existe depuis le début du chômage, on n’est plus dans les années 60, la tendance s’est inversée et s’accroît.
Seul le point des heures majorées est discutable, pour le reste, il était temps que quelqu’un remonte ses manches et agisse ! Beaucoup ont proposé des solutions. Le gouvernement de Sarkozy a changé quoi pour les classes moyennes ? Et pour les familles monoparentales ?
J’ai voté Hollande. J’ai souvent des doutes, mais je ne me vois pas voter ailleurs qu’à gauche. De toute façon, les éléments contextuels sont incontrôlables, et franchement, qui peut changer le monde ? (Je ne parle pas de le changer sur un programme, mais dans la vraie vie)